lundi 27 janvier 2020

Ce que l’on peut retenir du rapport Aubert sur l’éolien


commission d'enquête sur l'impact économique industriel et environnemental des énergies renouvelables, sur la transparence des financements et sur l'acceptabilité sociale des politiques de transitions énergétiques.

La commission d’enquête « sur l’impact économique, industriel et environnemental des énergies renouvelables, sur la transparence des financements et sur l’accessibilité sociale des politiques de transition énergétique », présidée par le député Julien Aubert (LR), vient de rendre ses conclusions, sur un rapport de la députée Marjolaine Meynier-Millefert (LREM).

Ce rapport, touchant évidemment à la question éolienne, est accessible en suivant le lien: http://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/dossiers/alt/impact_energies_renouvelables_ce. 

Son tome 1 contient le rapport d’enquête commenté ci-dessous, ses deux autres tomes la retranscription des auditions de la commission. Le premier tome du rapport comporte, outre la synthèse par la rapporteur des 100 auditions de la commission (pages 31 à 285), trois séries de propositions :
I. des propositions émises par le Président Julien Aubert dans son avant-propos (pages 9 à 29) :
Le président considère, en substance, que les objectifs techniques de la transition écologique doivent changer, en se concentrant sur la réduction des énergies fossiles. Les soutiens publics doivent ainsi être réorientés sur les actions d’efficacité énergétique à fort impact de réduction des émissions de CO2 : chauffage et transport.
Les conditions de la politique énergétique doivent être révisées en faisant droit à la demande d’acceptabilité sociale et environnementale.
La compréhension fiscale et la transparence peuvent être améliorées par la création d’une taxe unique liée à l’impact CO² des différentes énergies.
II. des recommandations de la rapporteur Marjolaine Meynier-Millefert (pages 287 à 293) :
Recommandations pouvant faire consensus :
- sortir du « produire +, mieux et – cher », privilégier les politiques visant à consommer moins, et sortir des logiques « tout électrique » ;
- mieux soutenir les EnR thermiques ;
- faire des économies d’énergie ;
- encourager la rénovation énergétique et lutter contre la précarité énergétique.
Idées générales acceptables mais recommandations concrètes non adaptées :
- mettre fin aux subventions dédiées aux EnR intermittentes : quand et comment ?
- améliorer la cohérence Etat – Région – EPCI en respectant les spécificités des territoires : comment ?
- mieux associer les citoyens : selon quelle mesure concrète ?
Un grand absent des recommandations : l’environnement
L’environnement se réduit dans le rapport à la baisse du CO², sans qu’aucun principe ne soit mis en exergue pour :
- réduire l’artificialisation des sols, protéger l’eau, la flore, la faune, les paysages et patrimoines ;
- protéger le cadre de vie et l’attractivité des territoires.
III. des propositions complémentaires émises par les membres de la Commission (pages 299 à 327).
***
Les recommandations de la SPPEF
Dès lors qu’il est acquis par le travail de la commission Aubert que les électricités intermittentes ne concourent pas à la réduction des émissions de CO², qu’il faut sortir d’une logique du « tout électrique » et faire droit à la demande d’acceptabilité dans les territoires, les propositions suivantes devraient être formulées :

1. Traduire les orientations de la Commission par un moratoire sur l’éolien :
Ce moratoire doit concerner l’éolien terrestre et maritime posé au sol. L’éolien flottant est, pour sa part, acceptable sous réserve d’un éloignement significatif et d’un accord des pêcheurs et des structures de protection de la faune marine et de l’avifaune.

2. Réviser la politique de soutiens budgétaires publics directs et indirects en :
- Cessant toute politique de soutien budgétaire aux électricités renouvelables dites matures (éolien et photovoltaïque) et réserver le dispositif de l’Accès Régulé à l’Electricité Nucléaire Historique (ARENH) aux opérateurs disposant de leurs propres capacités de production ;
- Donnant la priorité à la rénovation énergétique des bâtiments, dans le respect du patrimoine, et aux solutions de mobilité réduisant l’empreinte carbone ;
- Soutenant les EnR renouvelables thermiques.

3. Renouveler les règles de l’éolien terrestre :
- Éloigner les éoliennes des habitations et des élevages de 10 fois leur hauteur, pales comprises ;
- Renforcer les garanties des riverains : procédures de programmation régionale et locale, enquête publique, etc. ;
- N’accepter le repowering que sous des réserves techniques (pas d’augmentation des hauteurs ni des émissions sonores sur toute la bande des fréquences) et procédurales (une nouvelle étude d’impact et une nouvelle enquête publique) ;
- Porter le dépôt de garantie pour le démantèlement à 75 k€ par MW installé, en prévoyant un retrait complet des fondations en béton.

4. Remplacer l’Agence De l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie (ADEME) par une structure indépendante des opérateurs privés de l’énergie.
***
Morceaux choisis
1. « La transition du nucléaire vers les énergies électriques intermittentes (éolien, photovoltaïque) n’a aucun impact sur le CO² et ne permet donc pas de lutter contre le réchauffement climatique. » (source : avant-propos, page 9)
« Lors de son audition… M. Jean François Carenco, le président de la Commission de régulation de l’énergie (CRE), a ainsi convenu du fait que la transition énergétique et le développement des énergies renouvelables électriques ne sont pas réalisés dans le but de diminuer les émissions de gaz à effet de serre : « Il ne faut pas s’y tromper : grâce au mix énergétique décarboné, composé principalement de nucléaire et d’hydroélectrique, nous bénéficions déjà de faibles émissions de CO2 et d’un prix de l’électricité maîtrisé. Nous émettons six fois moins de CO2 que nos voisins allemands et le prix de l’électricité pour un consommateur résidentiel moyen est de l’ordre de 180 euros par mégawattheure contre 300 euros en Allemagne. Le développement des énergies renouvelables électriques ne sert donc pas à réduire les émissions de CO2. Il faut le rappeler, car on dit beaucoup de mensonges à ce sujet. Cela n’a aucun sens et procède d’une forme de populisme idéologique. » » (source : avant-propos, page 11)

2. « La politique énergétique doit être écologique, au-delà du seul objectif carbone. Il ne peut y avoir de politique énergétique sans prise en compte des préoccupations liées à la biodiversité. »
« Il serait paradoxal, au prétexte de développer une énergie verte, de se montrer moins exigeant sur ce plan qu’à l’égard des entreprises de production gazière ou pétrolière et alors que dans le temps même où on aménage les terrils des anciens sites miniers pour les verdir, on en vienne, pour tenir des objectifs quantitatifs irréalistes, à installer des éoliennes gigantesques dans les zones de pêche au mépris des efforts de reconstitution de la ressource qui ont été conduits, ou dans des forêts, des zones boisées ou des couloirs de migration d’oiseaux protégés, d’installer des centrales solaires sur des terrains à vocation agricole ou d’envisager la dissémination d’installations de méthanisation quasi industrielles dont l’épandage de l’eau ammoniacale constitutive de leur digestat appauvrira la faune du sol et comportera un risque pour les nappes phréatiques. » (source : avant-propos, page 28)

3. Il faut « sortir du principe « produire plus, mieux, moins cher », et privilégier chaque fois que c’est possible les politiques visant à consommer moins. » (source : recommandations, page 287)

4. Il faut « sortir d’une logique « tout électrique » et utiliser la meilleure énergie pour un usage donné (en pensant aux travaux menés sur l’énergie). » (source : recommandations, page 287)
« Nos politiques énergétiques devraient tendre à faire coïncider la meilleure énergie décarbonée par rapport à son usage et à son environnement (exemple ENR thermiques pour le chauffage). » (source : idem)

5. « Il faut rapprocher les Français de l’énergie … » (source : examen en commission, page 298)
« … Sobriété et efficacité énergétiques d’abord, production ensuite. » (source : idem)

6. « L’acceptabilité sociale s’érode en partie par manque de clarté dans la définition et la compréhension des objectifs, la nature et la charge des financements, ainsi que par un manque de cohérence entre les soutiens apportés et les objectifs affichés eux-mêmes. » (source : avant-propos, page 28) 
« … au vert des intentions et des discours se mêle, de plus en plus, le gris des pratiques et des résultats.
« … Il apparaît clairement que le soutien aux énergies renouvelables électriques apparaît excessif … Il serait raisonnable de basculer une partie de ce soutien en faveur d’une diminution des émissions de CO2 en s’attachant d’abord au volet thermique de la transition énergétique.
« … Sous prétexte de sécurisation, les choix faits fragilisent le réseau électrique, le subventionnement profite de façon excessive à des acteurs qui n’en n’ont pas besoin et les priorités du transport et du logement, au regard de la diminution des émissions de CO2, sont reléguées au second plan.
« … Au nom de l’exemplarité dans l’action pour le sauvetage de la planète, on s’ingénie à détruire des paysages et bouleverser la vie des gens. On a un peu trop oublié qu’il est aussi question de l’Homme dans la politique énergétique, comme en toute politique. » (source : avant-propos, page 28)

Bruno Ladsous, responsable du groupe éolien de Sites & Monuments

mardi 21 janvier 2020

PROPOSITION DE LOI pour un développement responsable et durable de l’énergie éolienne

Une nouvelle proposition de loi présentée à l'Assemblée nationale où une député de Saône et Loire s'engage.



Enregistrée à la Présidence de l’Assemblée nationale le 14 janvier 2020

présentée par Mesdames et Messieurs

Emmanuel MAQUET, Véronique LOUWAGIE, Laure de LA RAUDIÈRE, Marc LE FUR, Jean-Marie SERMIER, Valérie BEAUVAIS, Raphaël SCHELLENBERGER, Claude de GANAY, Arnaud VIALA, Bernard PERRUT, Laurence TRASTOUR-ISNART, Josiane CORNELOUP, Stéphane VIRY, Xavier BRETON, Éric PAUGET, Pierre MOREL-À-L’HUISSIER, Emmanuelle ANTHOINE, Isabelle VALENTIN, Valérie LACROUTE, Guy BRICOUT, Rémi DELATTE, Daniel FASQUELLE, Éric STRAUMANN, Vincent DESCOEUR, Frédérique MEUNIER, Stéphane DEMILLY, Bérengère POLETTI,
députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
L’énergie éolienne n’est pas une énergie comme les autres. Elle est paradoxale à plus d’un titre. Le premier paradoxe est que c’est l’une des sources d’énergie les moins productives du fait de l’intermittence du vent, pourtant elle est l’une des plus soutenues par l’État, ayant déjà obtenu plus de 9 milliards d’euros d’aides directes sur les vingt dernières années. Ce chiffre, qui ne comprend pas les coûts induits, comme l’adaptation de notre réseau électrique, a été atteint pour la majeure partie en-dehors de tout contrôle budgétaire du Parlement.
Et cet engagement budgétaire est appelé à grossir : lors de son audition le 4 avril 2019 devant la commission d’enquête sur l’impact économique, industriel et environnemental des énergies renouvelables, sur la transparence des financements et sur l’acceptabilité sociale des politiques de transition énergétique, le président de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) a indiqué que les sommes d’ores et déjà engagées pour la période 2019-2043 étaient, selon les hypothèses de prix du marché, entre 21 et 25 milliards pour l’éolien terrestre et entre 20 et 23 milliards pour l’éolien en mer.
Cela représente, si l’on prend l’estimation la plus basse, une moyenne d’1,7 milliard par an pour la filière éolienne. Et ce, sans même compter les dépenses nouvelles liées aux nouveaux projets nécessaires pour remplir les objectifs de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE). Celle-ci prévoit de porter la part de l’énergie éolienne à environ 15 % de notre production électrique en 2028. Dans son rapport spécial de juin 2019 sur la mission Écologie, développement et mobilités durables du budget 2018, M. Julien Aubert estimait l’impact budgétaire final du soutien public aux éoliennes, une fois rempli cet objectif, entre 72,7 et 90 milliards d’euros. Une somme colossale, équivalente à ce que la France a dépensé initialement pour se doter de son parc nucléaire, à ceci près que les éoliennes produiront cinq fois moins d’électricité et auront une durée de fonctionnement trois fois inférieure.
Si l’investissement public qui leur est consacré est sans commune mesure avec la capacité réelle des éoliennes à produire de l’électricité, l’investissement privé l’est tout autant. Tout se passe comme si la production d’électricité n’était pas la première chose que l’on attend des éoliennes. Compte tenu des conditions météorologiques, une éolienne ne fonctionne à pleine puissance en moyenne que 21 % du temps. En plus de ne pas pouvoir tourner quand il n’y a pas de vent, elles doivent aussi s’arrêter quand il y en a trop, sous peine de dégâts. C’est la raison pour laquelle, en 2017, lors du premier appel d’offres multi-technologies mettant en concurrence, pour 16 projets, à la fois des éoliennes et des panneaux photovoltaïques, l’ensemble des projets ont été remportés par des installations photovoltaïques. Parmi tous les dossiers déposés et pour une même puissance, les panneaux solaires étaient en moyenne capables de produire autant d’électricité à un prix 27 % moins cher que les éoliennes. Cela n’a pourtant pas suscité la moindre remise en question des objectifs stratégiques de la France en la matière.
Cette faible productivité conduit naturellement à un impact particulièrement faible des éoliennes dans notre bouquet énergétique, soit 5,1 % de la production nationale en 2018. En l’occurrence, même si elles produisaient dix fois plus, elles n’auraient toujours aucun impact sur nos émissions de gaz à effet de serre, puisqu’elles s’inscrivent dans le contexte français où la production d’électricité est déjà décarbonnée à 98 %. C’est le deuxième paradoxe de cette énergie : les éoliennes sont devenues le symbole de la transition énergétique alors qu’elles n’ont dans notre pays aucun impact sur les émissions de gaz à effet de serre qui provoquent le réchauffement climatique, ayant principalement vocation à remplacer le nucléaire qui ne produit pas de CO2.
D’après la documentation Base Carbone de l’Ademe, qui prend en compte l’intégralité du cycle de vie des énergies, y compris l’extraction et l’acheminement des éléments nécessaires à leur fonctionnement, les émissions de CO2 du secteur nucléaire sont de 6 grammes par kWh d’électricité, soit deux fois moins que l’éolien terrestre (12,7 g CO2eq/kWh). Cela fait du nucléaire l’énergie la plus propre du marché avec l’hydraulique.
À ce sujet, des « fake news » se sont profondément ancrées dans l’opinion publique, puisque d’après un sondage BVA pour Orano publié en juin 2019, 69 % des Français pensent que l’énergie nucléaire contribue au réchauffement climatique, ce chiffre s’élève à 86 % chez les 18-34 ans. Un contresens flagrant au regard des chiffres précédemment cités. Par ailleurs, si l’on observe la consommation d’énergie finale de notre pays, l’électricité n’en représentait que 26,6 % en 2016. Ce sont bien les produits pétroliers qui restent la première source énergétique de notre pays, avec 36,1 % de l’énergie finale, ultra-majoritaire dans les transports et l’agriculture. À la lumière de ces informations, la Cour des comptes a estimé en mars 2018 que, pour répondre aux enjeux climatiques, les objectifs nationaux auraient dû se concentrer sur les énergies renouvelables thermiques permettant de remplacer les produits pétroliers.
Ce n’est pour l’instant pas le cas, puisque le soutien public aux énergies renouvelables électriques est de l’ordre de dix fois supérieur au soutien aux énergies renouvelables thermiques. La Cour en tire la conclusion que l’objectif de la politique énergétique n’est pas de lutter contre le réchauffement climatique, mais de remplacer une énergie propre par une autre énergie propre plus coûteuse : « La place consacrée aux énergies renouvelables électriques dans la stratégie française répond à un autre objectif de politique énergétique, consistant à substituer les énergies renouvelables à l’énergie de source nucléaire. »
Les objectifs très volontaristes de développement éolien sont donc largement déconnectés de leur performance et de leur utilité climatique. Pire, ils demandent à nos concitoyens, en plus d’un effort financier, un effort sociétal pour les accepter malgré des externalités négatives conséquentes. C’est le troisième paradoxe éolien : alors que la silhouette distinctive des éoliennes est connotée très positivement auprès des médias et des gouvernements qui l’associent à une démarche environnementale vertueuse et progressiste, l’ampleur de leur impact sur le cadre de vie, particulièrement dans les campagnes, est inédit dans l’histoire. La physionomie des horizons ruraux, forgée par une structure agraire séculaire, n’avait jamais été aussi lourdement influencée par un élément industriel. C’est une profonde remise en question de la notion même de ruralité telle qu’elle est conçue et chérie dans notre inconscient collectif et qui constitue notre patrimoine immatériel au charme reconnu dans le monde entier. La présence de ces turbines y compris aux abords de monuments historiques peut sévèrement atteindre leur attractivité.
Pire, les nuisances sonores et électromagnétiques occasionnées par les éoliennes aux abords des zones d’habitation, ainsi que le brassage d’air qu’elles occasionnent, sont souvent évoqués par les riverains comme des nuisances pouvant affecter leur qualité de vie, mais aussi la valeur de leur patrimoine immobilier. La destruction massive d’oiseaux est également évoquée. Ces aspects n’ont manifestement pas fait l’objet d’études assez poussées de la part des pouvoirs publics, et mènent à la généralisation du mécontentement dans les départements les plus dotés en éoliennes.
Cette sous-évaluation des impacts négatifs des éoliennes constitue un autre paradoxe : malgré une popularité en apparence solide (d’après un sondage Harris Interactive pour France Énergie Éolienne d’octobre 2018, 73 % des Français ont une image positive des éoliennes), aucune autre industrie ne suscite autant de contestations judiciaires et sociales qui se manifestent par un taux très élevé de recours en justice. La situation est telle que le Gouvernement s’est résolu à supprimer par décret un degré de juridiction pour accélérer la purge des recours contentieux contre les éoliennes terrestres : une dérogation inédite qui vise à taire le malaise que suscite cette technologie dans l’opinion publique. Dans ce contexte, les outils de démocratie directe sont clairement mal pensés et donnent le sentiment qu’ils servent à écouter les promoteurs plutôt que le peuple. Un peuple qui ne bénéficie pas vraiment des retombées de la filière éolienne.
Évoquons enfin le cinquième paradoxe des éoliennes : malgré la place de premier ordre prise par la France dans le domaine éolien (7e pays mondial en terme de puissance installée), les retombées industrielles, commerciales et en termes d’emploi sont incomparablement plus faibles que celles que l’on peut observer dans d’autres pays voisins. Le secteur ne fournit que 18 000 emplois actifs, directs et indirects en France, moins d’un quart étant des emplois industriels. Par ailleurs, la balance commerciale de la filière était encore négative en 2015, avec environ 951 M€ d’importations pour 663 M€ d’exportations (rapport de 2017 de l’ADEME sur la filière éolienne française). En réalité, la France a échoué à créer le moindre champion industriel, important la plupart de ses équipements des leaders allemands et danois.
Dans ces conditions, une réforme globale et profonde du système éolien est nécessaire. La présente proposition de loi n’est pas une tentative d’opposition à la filière éolienne, dont les vertus sont reconnues, notamment la diversification de notre bouquet énergétique. Il s’agit simplement d’ancrer son développement dans une série de règles plus respectueuses de l’argent public, du cadre de vie de nos concitoyens et des impératifs de notre équilibre énergétique.
L’article premier établit un moratoire sur l’installation de nouvelles éoliennes afin de prendre le temps de la réflexion. Toutes les raisons évoquées ci-dessus donnent à penser qu’un emballement s’est produit. Ce moratoire permettra de clarifier les règles relatives à la filière. En Espagne, un tel moratoire a été mis en œuvre entre 2013 et 2016, ce qui a permis au pays de revoir sa réglementation. Cette décision a été bénéfique et n’a pas empêché l’Espagne de devenir l’un des leaders européens de l’éolien, qui couvre aujourd’hui 20 % de sa consommation d’énergie. Un moratoire a également été nécessaire en France en 2010 pour calmer l’emballement sur les panneaux solaires.
Une fois ce moratoire mis en place, les autres articles proposent toutes les réformes propres à constituer un meilleur cadre pour le développement durable et responsable de cette énergie.
L’article 2 vise à mettre fin aux aides publiques à la filière éolienne. En tant que filière mature et "au prix du marché", selon les mots du ministre de la transition écologique et solidaire, elle n’a manifestement plus besoin d’aides publiques.
L’article 3 vise à rendre obligatoire la mise en concurrence inter-technologies qui a déjà été essayée de manière concluante par le ministère de la transition écologique et solidaire.
L’article 4 vise à abroger les tarifs de rachat garantis.
L’article 5 vise à porter à 75 % l’importance pondérée du critère du prix des projets dans l’évaluation de la qualité des dossiers lors des appels d’offres.
L’article 6 vise à mettre en place un droit pour les régions de suspendre l’installation de nouvelles éoliennes dans le cas où ce qu’on pourrait appeler leur « indice d’effort éolien » (puissance installée par rapport à la surface par rapport au potentiel) serait trop supérieur à une autre région. Il s’agit de répartir l’effort équitablement entre toutes les régions de France en cohérence avec leurs capacités venteuses.
L’article 7 vise à supprimer l’exemption de la quote-part de raccordement pour l’éolien offshore, rajoutée par un amendement gouvernemental à la loi sur l’interdiction de l’exploitation des hydrocarbures en 2017. Cette exemption crée une distorsion de concurrence en France avec les autres filières (éolien terrestre, solaire photovoltaïque, etc.).
L’article 8 vise à réorganiser les retombées fiscales entre les communes d’où les éoliennes maritimes sont visibles. Actuellement, deux critères sont considérés : la distance qui sépare la commune des éoliennes et la population communale. Ce deuxième critère ne semble pas pertinent et devrait plutôt être remplacé par la longueur du linéaire côtier d’où les installations sont visibles.
L’article 9 vise à déclarer que le développement de l’énergie éolienne doit se faire dans le respect de l’environnement.
L’article 10 vise à améliorer la transparence et l’information du public en matière d’énergie éolienne, à l’aide d’un rapport annuel officiel qui contiendrait plusieurs informations actuellement difficiles d’accès ou disséminées.
L’article 11 vise à fixer la distance d’éloignement minimale entre les habitations et les éoliennes proportionnellement à la hauteur de ces dernières, conformément à la recommandation formulée par l’Académie de médecine dans son rapport de 2017. Ce rapport indique que les nuisances sont liées à la puissance des éoliennes, et donc à leur taille. Il précise également que plusieurs études « concluent qu’à l’intérieur d’un périmètre de 1,5 kilomètres le bruit émis par les éoliennes perturberait la qualité du sommeil ». Pour ces raisons, il est proposé de fixer un multiplicateur de huit fois la hauteur de l’éolienne, pales comprises. Cela permettrait que les éoliennes de 180 mètres de hauteur soient éloignées de près d’1,5 kilomètre des habitations. En France, la taille moyenne d’une éolienne est de 135 mètres : la distance d’éloignement des habitations passerait de 500 mètres actuellement à un kilomètre, soit la distance actuellement envisagée par les pouvoirs publics allemands.
L’article 12 reprend le dispositif adopté au Sénat en 2016 visant à protéger le patrimoine de l’implantation débridée d’éoliennes en demandant l’avis favorable des architectes des bâtiments de France (ABF) lorsque les turbines seront implantées en covisibilité avec des monuments historiques ou des sites de l’UNESCO.
L’article 13 vise à rendre obligatoire le démantèlement complet du socle en béton des éoliennes lors de la remise en état des sites. Actuellement, les textes réglementaires ne prévoient d’enlever le socle que sur un mètre de profondeur en zone agricole et deux mètres en zone forestière, or ces socles atteignent parfois une vingtaine de mètres de profondeur. Cela représente, fin 2018 environ 7 millions de tonnes de béton armé laissés dans les sols partout en France. L’obligation d’excavation des socles en béton armé serait, d’après M. Charles Lhermitte, vice-président de France Énergie Éolienne, « très simple et pas beaucoup plus coûteux ». Il est donc proposé de la mettre en place.
L’article 14 vise à faire de la garantie obligatoire exigée en prévision du développement des éoliennes, fonction du coût de construction du parc. En effet, actuellement, la garantie est fixée par l’arrêté du 26 août 2011 à 50 000 € par éolienne. Lors de la commission d’enquête, M. Jean-Yves Grandidier, fondateur et président du Groupe Valorem, a précisé : « Le démantèlement d’un parc éolien coûte 50 000 à 75 000 euros par MW, soit 3 % à 5 % du coût de construction. » Il est donc proposé d’exiger une garantie de 5 % du coût de construction.
L’article 15 vise à rendre obligatoire la saisine de la Commission nationale du débat public (CNDP) avant tout lancement de procédure de mise en concurrence pour la construction et l’exploitation d’éoliennes terrestres, comme c’est déjà le cas s’agissant de l’éolien offshore. Il est primordial que le public soit consulté, notamment sur la localisation du projet, afin de pallier le déficit démocratique et de légitimité qu’occasionne souvent une prise de décision unilatérale s’agissant des projets d’éoliens terrestres.
L’article 16 vise à ce que l’avis conforme en cas d’installation d’éoliennes en mer ayant un impact sur les fonds marins soit obligatoirement délégué aux parcs naturels marins.
 

lundi 20 janvier 2020

Éolien, les ONGs déposent un programme alternatif sur l’énergie

Communiqué :


Madame, Monsieur,

Plusieurs ONG nationales et régionales de protection de l’environnement et du patrimoine (*) ont déposé le vendredi 17 janvier 2019 au Ministère de la Transition énergétique et solidaire et  à l’Hôtel Matignon un programme alternatif pour la Programmation Pluriannuelle de l’Energie (PPE) 2019-2028.

La PPE en cours d’examen par le gouvernement  engagera la France  pour plusieurs années. Elle  a pour objectif d’assurer à la Nation son indépendance  énergétique, concrétiser ses devoirs au plan environnemental et  permettre  de respecter ses engagements au regard de la stratégie internationale bas carbone. Pour être acceptée elle doit être économiquement viable et  socialement juste.
Le projet de  PPE actuel élaboré par les services du Ministère de l’environnement est centré sur l’augmentation des énergies renouvelables intermittentes électriques, et en particulier la multiplication d’implantations de nouvelles éoliennes  terrestres. Il ne répond pas aux critères précédents, et engage une dépense inadaptée aux enjeux et moyens de la Nation.
En particulier, privilégiant les solutions « tout électrique » et notamment l’éolien, il est déconnecté des grands objectifs publics comme la reconquête de la biodiversité ou celui de la protection du patrimoine, de la nature et des paysages. Il ne respecte pas la  Charte de l’Environnement.
Générateur d’artificialisation des territoires ruraux agricoles et naturels, l’éolien engendre  une résistance croissante des riverains victimes qui ont le sentiment d’une injustice, et  il multiplie les conflits juridiques. Lors d’une récente table-ronde consacrée à l’écologie, Emmanuel Macron en  exprimant son scepticisme sur le développement de l’éolien terrestre en France a pris ainsi acte de l’erreur de ce  projet actuel de  la   PPE. Il a déclaré « Soyons lucides : la capacité à développer massivement l’éolien terrestre est réduite ». Il a ajouté « le consensus sur l’éolien est en train de nettement s’affaiblir dans notre pays » et estimé « qu’on ne peut pas imposer l’éolien d’en haut. »
Le moment est venu d’en tirer toutes les conséquences, et d’engager une nouvelle PPE intégrant les orientations fortes figurant dans ce programme alternatif proposé, plus respectueuses de l’environnement et moins chères pour les finances de notre pays.
En déposant ce programme alternatif, nos Fédérations exercent leur droit constitutionnel à participer à l’élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement.
Le 17 janvier 2020

Contact Presse :
Bruno Ladsous, administrateur de Sites & Monuments, ladsousbruno@gmail.com tél 0649693959
(*) parmi les 25 fédérations et associations déposantes : Fédération Environnement Durable, Fédération Vent de Colère, Patrimoine Environnement, La Demeure Historique, VMF Patrimoine, Sites & Monuments (SPPEF), Collectif Energie Vérité, et de nombreux collectifs régionaux (Normandie, PACA, Bourgogne, Occitanie, Grand-Est, Hauts-de-France, Val de Loire …).

jeudi 12 décembre 2019

Le nouvel ami du climat?


 COP25 – l'énergie nucléaire en pointillé

Cécile Crampon - sources COP25 et WNN

Événement phare autour des enjeux climatiques, la COP 25 sur le climat se tient du 2 au 13 décembre 2019 à Madrid, sous présidence chilienne. Si les sujets abordés relèvent cette année, en particulier, des océans, de la biodiversité, de l’adaptation, de l’économie circulaire, des villes, de l’électromobilité, le nucléaire, énergie bas carbone, est encore à la marge. Mais sa place dans le débat progresse.

Le nucléaire, ami du climat, reconnu au niveau européen

Le 28 novembre 2018, la veille de l’ouverture de la COP25, le Parlement européen a voté une résolution pour exprimer sa position sur la question climatique. En parallèle de ce texte, les eurodéputés ont reconnu le rôle de l’énergie nucléaire dans la lutte contre le changement climatique. Une grande première dans le monde de l'énergie.


Le nucléaire n’a pas encore sa place comme il le mérite à la COP...

L’énergie nucléaire est reconnue par la communauté scientifique pour ses faibles émissions de gaz à effet de serre. En prenant en compte les émissions générées sur l’ensemble du cycle de vie d’une installation, le GIEC classe le nucléaire au même niveau que l’éolien, 12 g CO2/kWhsur le plan international. Alors que le nucléaire représente la 2ème source d’éléctricité bas carbone dans le monde (après l’hydroélectricité), l’efficacité de l’énergie nucléaire à réduire les émissions est démontrée[1]. Pourtant, force est de constater que le nucléaire n’a pas toujours la place qu’il mérite aux COP.  Mais depuis 2015, il faut noter la présence de volontaires, principalement de la jeune génération européenne de l’Energy nuclear society (ENS) venant d’Espagne, de France, Pologne, République techèque, Japon et Canada. La SFEN est aussi co-fondatrice avec l’ENS et l’American Nuclear Society (ANS) de NuclearforClimate qui regroupe aujourd’hui près de 150 associations dans le monde.

C'est dans ce contexte qu'au lendemain de l’ouverture de la COP25, NuclearforClimate organisait une conférence[2] « No time to lose – Why the world needs all low-carbone energy sources to achieve its climate goals[3] », attirant un public diversifié.

... mais le nucléaire est reconnu par les grandes institutions  

Tous les orateurs ont noté les progrès réalisés par l'industrie nucléaire dans le débat sur le climat : l'initiative NICE Future garantit que le nucléaire est désormais correctement représenté à la dernière Conférence ministérielle sur l'énergie propre. Les récents rapports du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC), de l'Agence internationale de l'énergie (AIE) et du Conseil mondial de l'énergie ont tous mis en évidence le rôle de l'énergie nucléaire dans la transition énergétique. De même, l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) a organisé sa toute première conférence sur le changement climatique et le rôle de l'énergie nucléaire, à laquelle le GIEC, le Département des affaires économiques et sociales des Nations Unies, la Commission économique des Nations Unies pour l'Europe et l'Organisation des Nations Unies pour le développement industriel, tous, ont participé.
Valérie Faudon a évoqué le rapport que l'AIE a publié en mai 2019 sur « L'énergie nucléaire dans un système d'énergie propre », et rappelé les propos de son directeur général : « Outre les énergies renouvelables, l'efficacité énergétique et d'autres technologies innovantes, le nucléaire peut apporter une contribution significative à la réalisation des objectifs énergétiques durables et améliorer la sécurité énergétique ». Cette remarque est loin d’être anodine quand on sait qu’en dépit de la part croissante des énergies renouvelables dans le bouquet électrique mondial, l'utilisation des combustibles fossiles reste inchangée.

Des questions sur le coût du nucléaire

Toujours à cette conférence, de nombreuses questions ont été posées, à commencer par Mario José Molina[4], sur l’économie du nucléaire. Jadida Najder, une consultante en génie nucléaire, a cité une étude du Massachusetts Institute of Technology (MIT) analysant les raisons d'un ralentissement de la croissance de l'énergie nucléaire dans le monde. Selon le MIT, les mesures qui pourraient être prises pour arrêter ou inverser cette tendance doivent tendre vers la réduction du coût de construction de nouvelles capacités nucléaires et la création de conditions équitables qui permettraient à toutes les technologies de production à faible émission de carbone de rivaliser sur leurs mérites. « Nous nous réjouissons de l'avenir et nous savons que l'industrie nucléaire est prête à coopérer avec des sources d'énergie renouvelables de manière flexible », a-t-elle déclaré, ajoutant que le coût, la taille, la flexibilité et la modularité des petits réacteurs modulaires (SMR) offrent des solutions en termes production d'électricité mais aussi dans d'autres secteurs, comme le chauffage urbain ».


Sur les mines d’uranium et les autres ressources minérales

D’autres questions portaient sur l’exploitation d’uranium dans le monde et les relations avec les populations locales, sur la comparaison faite avec les autres sources d’énergie ou sur les ressources minérales du secteur minier.  Sébastien Richet a décrit les recherches du GISOC[5] sur les solutions bas carbone dans le contexte des scénarios 1,5 et 2 degrés du GIEC, et les objectifs de développement durable de l'ONU.
L'analyse du GISOC a établi un « facteur de limitation des éléments » (ELF) comme le rapport entre la consommation et les ressources jusqu'en 2050. Parmi les sources d'énergie étudiées, la plus grande ELF (plus de 20) est supportée par les batteries pour l'énergie solaire et éolienne en raison de la « limitation des éléments » du lithium et des métaux des terres rares. « Le plus petit ELF (moins de 1) est détenu par l'énergie nucléaire avec des réacteurs de retraitement et de génération IV car il n'y a pas de limitation d'élément. L'énergie nucléaire sans retraitement et les réacteurs de génération IV ont un ELF de 2, la limitation de l'élément étant l'uranium ». Et de conclure que « seul le développement de l'énergie nucléaire conjointement avec le retraitement et les réacteurs GEN IV, en association avec la bioénergie et le captage et le stockage du carbone, l'utilisation de véhicules électriques et, dans une certaine mesure, l'utilisation d'autres productions d'énergie dans les régions reculées, a le potentiel de satisfaire les différents Objectifs de développement durable (ODD) retenus dans notre document tout en répondant à l'urgence du changement climatique ».

Que faisons-nous face à l’urgence climatique ?

A cette question, Ignacio Araluce a décrit sa frustration devant le manque de compréhension concernant l'énergie nucléaire qui « est l'un des moyens les plus importants d'atténuer le changement climatique ».
« Nous devons agir maintenant. Une urgence pour la planète, pour l'humanité, nécessite toutes sortes de moyens pour agir. Le nucléaire et l'hydroélectricité, historiquement et aujourd'hui, continuent de contribuer le plus à la lutte contre les émissions de CO2, alors quel est le problème ? ». Notant que le nucléaire représente 40 % de la production sans CO2 dans son pays, l'Espagne, et 50 % en Europe, il a demandé pourquoi le nucléaire n'est pas pris en charge dans la taxonomie de la finance durable de l'Union européenne. « Pourquoi avons-nous confiance en les énergies renouvelables ? Parce que la technologie sur le stockage de batteries se développe, mais alors pourquoi ne pas avoir confiance dans l'avenir de la technologie pour le traitement des déchets radioactifs ? Pourquoi y a-t-il confiance dans une technologie mais pas dans une autre ? Nous devons soutenir toutes les énergies propres - renouvelables, hydroélectriques et nucléaire - et ne pas y mettre d'obstacles lorsque nous allons tous dans la même direction. Nous sommes en situation d'urgence climatique et nous devons tous travailler ensemble ».
Pour Jadida Najder, « les gens souffrent déjà à cause des émissions du passé, du présent et du futur. Nous savons quoi faire. Nous devons décarboniser le secteur de l'électricité. Nous devons électrifier le plus grand nombre possible d'autres secteurs et la plupart des prévisions montrent que la demande d'électricité va augmenter. La question est de savoir comment nous devrions produire toute l'électricité pour cette demande croissante ».

A suivre la COP25 qui se clôturera le 13 décembre 2019.

[1] D’après l’AIE, le nucl »aire a permis d’éviter cinq ans d’émissions de CO2 du secteur électrique dans le monde depuis 1970.
[2] Avec la participation de Valérie Faudon, cofondatrice de Nuclear for Climate et vice-présidente de la Société nucléaire européenne ( ENS), Ignacio Araluce, président du Forum espagnol de l'industrie nucléaire, Jadwiga Najder, vice-président du réseau ENS Young Generation Network, et Sébastien Richet, président de l'Initiative mondiale pour sauver notre climat (GISOC)
[3] Pas de temps à perdre - pourquoi le monde a besoin de toutes les sources d'énergie à faible émission de carbone pour atteindre ses objectifs climatiques
[4] Chimiste mexicain et prix Nobel de Chimie en 1995. Avec Paul Josef Crutzen et Frank Sherwood Rowland, il obtint en 1995 le prix Nobel de chimie « pour leurs travaux sur la chimie de l'atmosphère, particulièrement en ce qui concerne la formation et la décomposition de l'ozone »
[5] Le GISOC est une collaboration internationale de scientifiques et d'ingénieurs qui aide le GIEC.

dimanche 8 décembre 2019

Effet tache d'huile sur l'éolien

Après la commission Julien AUBERT à l'Assemblée nationale,
l'Allier, la Charente-Maritime, le Cantal, le Gard,l a Charente, les Deux-Sèvres, Grand-Est, les Hauts de France, Rhône-Alpes...

les collectivités demandent un moratoire éolien!!


En Saône et Loire

toujours RIEN!

mercredi 6 novembre 2019

Des éleveurs dénoncent des troubles d'origine électrique et saisissent la justice

Le Mans, France | AFP | lundi 04/11/2019 - Une douzaine d'éleveurs de plusieurs régions de France vont engager des procédures judiciaires pour faire reconnaître d'importants troubles, selon eux d'origine électrique, ayant un grave impact sur leur santé et celle de leurs animaux, ont-il annoncé lundi au Mans.



 

En cause selon eux: l'installation d'une antenne relais, d'une ligne à haute tension, d'éoliennes, d'un transformateur électrique, d'un parc photovoltaïque... à proximité de leurs élevages.
Plusieurs de ces éleveurs, membres de l'Association nationale des animaux sous tension (Anast), ont témoigné de leurs difficultés lors d'une conférence de presse, parfois les larmes aux yeux, certains ayant dû mettre la clé sous la porte. 
Tous décrivent l'apparition subite de troubles du comportement chez leurs bêtes, une forte mortalité, des malformations, etc. Parfois, c'est l'éleveur lui-même qui est touché, souffrant notamment de migraines.
Alain Crouillebois, éleveur dans l'Orne, raconte comment ses ennuis ont commencé en 2011 avec l'enfouissement d'une ligne électrique de 20.000 volts à proximité de son élevage. Vaches qui refusent la traite, maladies, décès... Au total, il dit avoir perdu "plusieurs centaines de milliers d'euros". 
C'est seulement lorsqu'il décide en 2019 de déplacer à ses frais une partie de la ligne qu'il constate une amélioration.
Une douzaine de plaintes pour "trouble anormal de voisinage" seront déposées d'ici à mars 2020 devant plusieurs TGI de France afin d'obtenir des indemnisations, a annoncé leur avocat, Me François Lafforgue.
"Il y a une organisation de l'opacité depuis de nombreuses années, on a rendu invisible ce qui aurait dû être porté à la connaissance de tous", a-t-il dénoncé, mettant en cause un "lobby électrique" qu'il compare à celui de l'amiante et des pesticides.
Pour le président de l'Anast, Serge Provost, "au moins des centaines d'éleveurs sont concernés" par ces troubles qui affectent leurs élevages. 
Une action a également été engagée le 31 octobre contre le ministère de l'Agriculture devant le tribunal administratif de Paris pour que tous les documents du GPSE, le Groupement permanent pour la sécurité électrique créé en 1999 sous l'égide du ministère de l'Agriculture pour comprendre l'origine des troubles, soient communiqués à l'Anast. 
"On a détourné le GPSE de son objet premier. Assez vite, ça a été un organisme chargé d'incriminer les éleveurs, de trouver des explications autres que celles qui paraissaient évidentes et de garantir la non divulgation des problèmes en leur faisant signer des clauses de confidentialité", a souligné Me Lafforgue, estimant qu'on "a essayé de cacher les problèmes aux autres éleveurs" et qu'on a "trouvé des solutions d'indemnisation quand on ne pouvait pas faire autrement pour éviter que le dossier aille en justice".
En 2015, la cour d'appel de Caen avait établi un lien de causalité entre une ligne à très haute tension et la baisse de la qualité du lait d'un éleveur de l'Orne, condamnant le distributeur RTE à l'indemniser.
"Jusqu'ici, le GPSE n'a pas établi de relation de causalité entre les symptômes relevés sur des animaux d'élevage et les ondes électromagnétiques", a réagi le ministère de l'Agriculture auprès de l'AFP.
"A réception du courrier de l'Anast, une expertise juridique a été engagée par le ministère de l'Agriculture et l'Alimentation, compte tenu de la complexité du dossier: le GPSE a en effet un statut d'association et perçoit des subventions publiques. Une réponse lui sera adressée dans les meilleurs délais", a ajouté le ministère.

jeudi 31 octobre 2019

Pour « sauver la planète », l’industrie tue les campagnes

Au nom de la transition énergétique, les campagnes s’industrialisent à grande vitesse. L’autrice de cette tribune raconte la métamorphose de la Haute-Marne, autrefois vivante et dorénavant colonisée par les éoliennes, les méthaniseurs, les plantations de biomasse…

Blandine Vue est docteur ès lettres, diplômée en sciences du langage, lauréate de la Fondation Nicolas Hulot pour ses activités pédagogiques de terrain. Elle a publié plusieurs ouvrages, dont Histoire des paysages (éd. Errance) et un roman, La Colonie (éditions L’Harmattan).
30 octobre 2019 / Blandine Vue

Photomontage Saint André le Désert 71
Il est minuit, ma maison vrombit, mon cœur est écrasé, mon crâne résonne. Les fenêtres fermées, les boules Quies ne font qu’empirer les choses. Où aller ? Au fond des bois ? Les infrasons des éoliennes industrielles ne connaissent pas les frontières. Elles sont partout. Mon corps est à bout.
Seules deux vallées ne sont pas encore attaquées à proximité de chez moi. Les mâts des éoliennes et les méthaniseurs poussent aussi vite que tombent les forêts ! Il n’y a plus de refuge. La campagne s’industrialise.
J’ai passé le week-end chez moi, face aux collines, dans mon village de 70 habitants, la maison dans laquelle mes enfants ont grandi, qu’on a restaurée ensemble. J’avais beaucoup à faire, je n’ai rien fait ou presque, je n’ai pas eu besoin de regarder la météo pour savoir d’où venait le vent. Mon corps n’avait qu’une tension, fuir ce lieu inondé par un poison vibratoire. Du sud au nord, en passant par l’ouest, plus de 70 éoliennes industrielles de 150 mètres. À l’Est, six, 183 m de haut, diamètre 150 m, bientôt 29. Partout, des centaines en projet ou prêtes à sortir de terre. Du haut de la colline, j’ai dit adieu aux couchers de soleil il y a neuf ans, et récemment aux levers. Adieu à la nuit pure. Les promenades sur le plateau rendent fou.

Les bois qui n’ont pas encore été rasés sont dépouillés depuis qu’on ne parle plus de forêts, mais de biomasse 

À 200 m de la maison, deux fermes, « normales » il y a peu, incarcèrent désormais douze mois sur douze quelques centaines de vaches sous les tôles. Ventilateurs, tanks à lait, robots de traite, engins qui désilent, mélangent, transportent, paillent, distribuent, curent, et retransportent. Les bruits de moteur sont incessants. Vaches à méthane ou vaches à lait, toutes ont le même sort, les riverains aussi !
Marie, une riveraine, est à bout, sur sa petite route de campagne. Sept jours sur sept, les tracteurs passent pour alimenter le méthaniseur voisin en fumier collecté dans un rayon de 60 km, les prés ont été retournés pour planter le maïs qui servira à nourrir le méthaniseur et les vaches prisonnières qui fournissent la manne. La paille aussi voyage. Sous la canicule, les vaches enfermées hurlent, tapent nuit et jour dans la ferraille qui les enferme, l’ensilage pue.
Où aller ? Au fond des bois ? Quels bois ? Ceux qui n’ont pas encore été rasés sont dépouillés depuis qu’on ne parle plus de forêts, mais de biomasse. De mes fenêtres, je vois clair au travers des collines. Plus de sous-bois, des champs de troncs. Le long des chemins, les arbres trop jeunes, condamnés à ne pas devenir des chênes centenaires, s’alignent, en attendant d’être déchiquetés avec beaucoup d’énergie, recollés en pellets, voire transformés en carburant ! Il y a quelque temps, un bûcheron s’inquiétait : « Dans dix ans, il n’y aura plus rien ! » Sur les photos aériennes, une bande boisée au bord des routes, pour tromper le peuple, mais c’est une coquille vide. Dix ans, c’était optimiste. Qui ose encore signer les pétitions contre la déforestation de la forêt amazonienne ? Le poumon vert de la France, ça ne compte pas ?
Officiellement, on n’a plus le droit de retourner les prairies [pas pour leur flore et leur faune, on s’en moque, mais comme pièges à carbone, fixateurs de sol…] Jamais on n’en a retourné autant que depuis les débuts de la « transition énergétique » ! Pour le maïs des méthaniseurs, le colza des carburants… Qui ose encore signer les pétitions contre l’huile de palme ?
« C’est une violence inouïe ! » m’a dit ce citadin reconverti à l’agriculture bio. Pour moi, c’est un viol. Un viol de ce pays qui m’a vue grandir, que mes ancêtres paysans ont soigné, que j’ai parcouru jusque dans ses moindres recoins… Un viol de mon droit au silence, ce bien le plus précieux. Depuis bientôt dix ans, hormis quelques nuits glaciales sans vent, pas une heure sans bourdonnement de moteur ou d’éolienne, dans ma maison dont les murs tremblent de cette maladie galopante.
Je bondis en lisant une phrase de l’association NégaWatt : « Nous avons également de vastes zones peu peuplées qui permettent l’installation [d’éoliennes]. » Ben voyons ! Nos élus comptent aussi remplir ainsi la « diagonale du vide ». Mais le vide n’est pas vide, nous y vivons, la nature y vit. Nous ne sommes pas un territoire à coloniser ! Pour eux, nous sommes une poignée de sauvages qui empêchent l’expansion de projets, qu’ils n’osent plus appeler « progrès », mais ont rebaptisé « transition énergétique », et font passer pour une « reconversion écologique ». Nous préférions être abandonnés : au moins, on nous laissait tranquilles !

On n’a pas le droit d’avouer que quelque chose cloche dans ce qui est présenté comme la seule issue 

L’écologie, c’est ce que nous avions, avant. Du silence, de vraies nuits, des forêts gérées avec sagesse en mode cueillette, avec respect pour leurs bêtes, grandes et petites. Celles qui ne peuvent pas fuir crèvent désormais au soleil de vastes étendues rasées, les autres ne savent plus où aller. L’écologie, ce n’est pas ce monde industriel qui se cache derrière des noms aguicheurs.
Ce monde, on nous l’impose sans démocratie, avec le plus profond déni de notre citoyenneté, des enquêtes publiques, qui sont des mascarades, les rares refus préfectoraux étant cassés par les tribunaux administratifs. Les enquêtes surviennent sans annonce claire, il faut surveiller les sites préfectoraux, qui ont changé de page sans l’annoncer clairement, supprimé les dates, lieux, natures d’activité ; certains se retrouvent avec des éoliennes derrière chez eux sans jamais en avoir entendu parler. Lors des plaintes, les promoteurs sont juge et partie, seules leurs conclusions sont retenues. La notion de conflit d’intérêts disparaît, les directives régionales sont piétinées, les lois faites sur mesure pour faciliter l’invasion…
Nous sommes dépossédés de notre territoire, sans droit à la parole, sans droit de nous défendre, la proie de lobbies qui manipulent le pouvoir. On nous accuse de « retarder la transition énergétique » avec nos vaines rébellions ; retarder, c’est tout, on se défend, mais on se fait quand même dévorer ! La démocratie est bafouée.
Ceux qui pleurent à cause du bruit, des acouphènes, du cœur qui s’emballe au rythme des pales osent rarement témoigner. Ils ont honte, ce ne serait pas politiquement correct, il faut accepter de souffrir pour « le bien de la planète ». On n’a pas le droit d’avouer que quelque chose cloche dans ce qui est présenté comme la seule issue. Ils ont peur, aussi. Alors que l’électrosensibilité peine à se faire reconnaître, on se gausse de la sensibilité aux infrasons, trop méconnue, qu’on fait passer pour une maladie psychique.

On assiste à un parfait écocide, discret, se cachant sous de pseudo « bonnes intentions » 

« Les opposants retardent la transition énergétique. » Mais qui se penche sur nos vies brisées, nos investissements et nos projets tués ? Les vergers que nous ne plantons plus, la maison devenue invivable et invendable, nos promenades quotidiennes, les circuits de randonnée, le panorama d’une ville touristique… L’âme de nos campagnes, notre silence, notre sommeil, notre santé, notre capacité de concentration et celle des enfants des écoles, notre efficacité au travail, les étoiles, le noir de la nuit, nos forêts, nos prairies, la liberté des vaches, le relief, écrasé, ce qu’on n’a plus la force de faire. Tout est tué brutalement ou à petit feu.
Et les ressources ! Que de pétrole pour nourrir avec l’ensilage et l’enrubanné de l’an dernier des vaches qui il y a peu broutaient dehors, là où on cultive le maïs qu’elles ingurgiteront l’an prochain ; pour ériger ces monstres blancs trois fois plus hauts que nos collines, qui, ici, ne fonctionnent qu’à 18 % de leur capacité, de façon intermittente et aléatoire ; pour couper, transporter, déchiqueter nos trop jeunes arbres, cultiver le maïs et le colza. Pour fuir ! Que de sols détruits ! Nous sommes assez près de notre terre pour constater au quotidien cette tromperie que les citadins ne voient pas !
Si au moins tout cela servait à autre chose qu’engraisser sur nos deniers des lobbies et ceux qui leur ouvrent grand les portes.Nous sommes sacrifiés sur l’autel d’une idéologie capitaliste qui veut vendre les engins nécessaires à son accomplissement. Jamais nous n’avons vu autant de machines, entendu autant de moteurs dans nos campagnes, nos forêts, planer sur nos têtes… La « croissance verte » tue l’idée de décroissance, autant que nos territoires, pour justifier ses objectifs.
On assiste à un parfait écocide, discret, se cachant sous de pseudo « bonnes intentions », ou pire, sous une injonction de « sauver la planète ». Mais on s’est trompé de ministère, la production d’énergie pour le confort humain, ce n’est jamais de l’écologie, c’est de l’industrie !
Comme chaque fois que le vent vient du nord-ouest, ma maison vrombit plus que les autres jours. Mon corps ne sait où aller, je pleure. Dans quelques mois, le vent d’est sera lui aussi un poison. Arrêtez la torture ! Laissez-nous vivre ! VIVRE !