vendredi 5 août 2022

La France n’aurait jamais dû subir une telle crise énergétique

 

TRIBUNE. Pour Bernard Accoyer, la vulnérabilité énergétique de la France est imputable aux antinucléaires qui ont exercé le pouvoir ces dernières années.

Par Bernard Accoyer* 

 

Publié le 01/08/2022 à 07:00

Selon la formule prêtée à Albert Einstein, « On ne résout pas les problèmes avec ceux qui les ont créés. » Pourquoi cela ne vaudrait-il pas pour la crise énergétique française ? La crise ukrainienne a révélé la vulnérabilité stratégique de la France en matière d'approvisionnement énergétique. Tout n'est cependant pas imputable à Vladimir Poutine. Dans les faits, notre dépendance au gaz russe est minime et la crise énergétique va se produire là où nous devrions aujourd'hui régner en maître et n'avoir aucune inquiétude : la production électrique. La France entre dans une crise énergétique à laquelle elle aurait dû échapper, si des décisions courageuses et raisonnables avaient été prises en temps utile.

L'exécutif incite à regarder ailleurs, se défausse ou invoque le contexte mondial. Personne n'est dupe : lui, ses conseillers, et les responsables de son administration, notamment RTE

(gestionnaire du réseau de transport d'électricité) et la Commission de régulation de l'énergie (CRE), sont bien les coresponsables de ce qui est en train de nous arriver. Depuis l'élection présidentielle de 2012, des décisions politiques malheureuses ont été prises en oubliant les lois de la physique et en occultant les conséquences de ces choix, malgré les mises en garde de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN).

Ainsi, ce sont 12 gigawatts (GW) de capacités de production d'électricité pilotables qui ont été supprimés depuis dix ans, avec notamment la fermeture avancée de la centrale nucléaire de Fessenheim (Alsace) – pourtant en parfait état de fonctionnement –, une véritable faute industrielle exigée par l'écologie politique, une trahison énergétique.

Plusieurs mises en garde

La fermeture de ce qui représente plus de 10 % des capacités de production comme le désinvestissement dans le nucléaire sont la cause de la crise française, en dépit des recommandations de tous les présidents de l'ASN, depuis 2007, alertant sur la nécessité de disposer de capacités de production de réserve pour pouvoir faire face à un incident générique sur le parc nucléaire. L'arrêt d'une partie de ce parc pour des phénomènes de corrosion sous contrainte constitue un tel incident, toujours possible dans tout système industriel. Les décisions de fermetures ont été le choix de politiques restés sourds aux avis techniques compétents. Se défausser sur le seul parc n'est pas recevable.

De nombreuses voix, en leur temps, avaient aussi mis en garde les gouvernements en 2014, 2017, 2019, sans être entendues. Hélas, les administrations chargées d'alerter les autorités sur les risques évidents résultant de ces décisions sont restées muettes. Un tel entêtement n'aurait pas été possible si la consanguinité entre le politique et les instances de régulation ou de production du secteur, particulièrement perverse, n'avait accouché d'un discours officiel reposant sur des analyses totalement biaisées.

Aveuglement idéologique

Sur le plan gouvernemental, la nomination de ministres militants antinucléaires à la tête du ministère chargé de l'Énergie a fait de la politique énergétique la monnaie d'échange successivement utilisée par François Hollande puis par Emmanuel Macron pour s'allier avec les décroissants et les antinucléaires.

Leurs desseins n'auraient cependant pas été rendus possibles si les agences de l'État n'avaient pas été idéologiquement détournées de leur mission de prospective, de conseil et d'alerte des pouvoirs publics, par des nominations à leur présidence de personnalités politiques, ainsi récompensées pour leur ralliement, en lieu et place de nominations de techniciens reconnus et politiquement non engagés.

C'est le cas, par exemple, de l'Ademe (Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie), pilote de la pensée antinucléaire, présidée par Arnaud Leroy, ancien député socialiste, qui a publié un scénario « Vers un mix électrique 100 % renouvelable » (2018) ; ou de la nomination de l'ancien député François Brottes (socialiste), pivot de la loi Royal de 2015, à la tête de RTE, prescrivant la fermeture de 14 réacteurs en 2025, échéance repoussée ensuite à 2035, échéance tout aussi utopique. Puis son remplacement par Xavier Piechaczyk, en 2020, un proche du président de la République qui avait copiloté la rédaction de la loi de 2015.

RTE, instance responsable de l'équilibre du système électrique, chargée de transmettre les informations prospectives aux pouvoirs publics afin qu'il anticipe sa politique énergétique, n'a cessé de se contorsionner pour justifier des plans « zéro nucléaire » totalement inapplicables, au risque de se discréditer (janvier 2021), puis de produire des scénarios de stratégie électrique sur commande totalement inverses pour justifier le virage macronien de l'automne 2021. La Commission de régulation de l'énergie n'a pas échappé à cette « déprofessionnalisation » politique, contraire à l'indépendance indispensable des autorités « indépendantes » censées par définition conseiller ou trancher à distance des pressions politiques.

En finir avec le dogmatisme

Si l'on veut hâter la sortie de crise et le retour à une meilleure situation, il faut nommer à ces responsabilités des personnalités techniquement qualifiées sans lien avec l'exécutif ni engagement politique patent. Pour la sélection du meilleur candidat, la seule question qui vaille est : « Quelle compétence détient cette personne pour justifier son ambition d'exercer cette responsabilité hautement stratégique, au service de la France et des Français ? » Cela vaut notamment pour les grands acteurs du secteur – CRE, EDF, RTE…

Il faut maintenant sortir des errements qui ont provoqué cette crise.

Sur ce point, la proposition de nomination avancée par le président de la République à la présidence de la CRE est un continuum qui, si elle se concrétisait, placerait cette personnalité entre les mains des conseillers de l'exécutif, ceux-là mêmes qui portent en partage la responsabilité de la crise énergétique à laquelle la France aurait dû échapper.

Dans tous les scénarios, la sortie de crise sera longue. Il faut maintenant sortir des errements qui ont provoqué cette crise, oublier les positions dogmatiques, s'en tenir à la raison et engager sans plus attendre les mesures de redressement qui s'imposent.

* Bernard Accoyer est le président de PNC-France, une association pronucléaire. Il a été président (UMP) de l'Assemblée nationale de 2007 à 2012.

Le décryptage des nouvelles structures gouvernementales

 


 

Chers amis et sympathisants
 


Le Président de la République s’est engagé pendant la campagne des élections présidentielles à faire de la planification écologique l’un des piliers de son nouveau quinquennat et à en confier la responsabilité directe au Premier ministre.  

Cette promesse s’est traduite, dans la structure de l’exécutif, par la création d’un secrétariat général à l’exécutif, d’un ministère de la transition énergétique ainsi que d’un ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires, auquel est rattaché une secrétaire d’Etat en charge de l’écologie.   

Dans ce flash Cérémé, nous vous proposons de vous présenter les attributions de chacun des acteurs de ce nouveau dispositif.  

 

I.                   Le Secrétariat général à la planification écologique  

 

Le secrétariat à la planification écologique est placé sous l’autorité de la Première ministre. Ainsi que le dispose le décret n°2022-990 du 7 juillet 2022, il est chargé de coordonner l’élaboration des stratégies nationales en matière de climat, d’énergie, de biodiversité et d’économie circulaire. Il veille à :

-          la soutenabilité de ces stratégies et à leur différenciation, afin de s’adapter aux particularités de chaque territoire,

-          la mise en œuvre de ces stratégies par l’ensemble des ministères concernés et à leur déclinaison en plans d’actions,

-          l’évaluation régulière des politiques menées au titre de ces stratégies,

-          la cohérence de l’ensemble des politiques menées au titre de la planification écologique.

 

Le secrétaire général à la planification écologique coordonne l’élaboration des feuilles de route des ministres et s’assure de l’implication de ceux-ci et de la cohérence de leurs actions. Son positionnement sous l’autorité directe de la Première ministre témoigne d’une volonté de pilotage resserré de Matignon sur la planification écologique, qui doit devenir l’un des fils directeurs du quinquennat et irriguer l’ensemble des politiques publiques.  

C’est Antoine Pellion, qui a été nommé secrétaire général à la planification écologique. Il conservera, parallèlement, son poste de chef du pôle Ecologie, Transport, Energie, Logement, et Transport au cabinet de la Première ministre. Passé par Framatome, Areva, Total, la DRIEE d’Île-de-France, le cabinet de Ségolène Royal la DGEC, Enedis puis plus récemment le cabinet de Jean Castex, il dispose d’une connaissance et d’une expérience reconnues dans le domaine de la politique énergétique.  

Il sera appuyé par une équipe de plusieurs dizaines de personnes ainsi que par les directions centrales des ministères, notamment le commissariat général au développement durable. A ce stade, son équipe est composé de deux personnes. Elle devrait être de 15 collaborateurs à la rentrée puis grossir progressivement.  

 

II.                 La Ministre de la transition énergétique

 

En vertu du décret n°2022-845 du 1er juin 2022, la ministre de la transition énergétique définit et met en œuvre la politique de l’énergie de manière à assurer la sécurité d’approvisionnement, l’accès à l’énergie et à  lutter contre le changement climatique.

Elle est notamment compétente en matière de développement des énergies renouvelables, d’entretien et de construction de réacteurs nucléaires, de développement de l’hydrogène, de décarbonation des transports routiers, de tarifs de l’énergie et de politique industrielle en matière énergétique.

En matière de moyens, la ministre de la transition énergétique a autorité sur :

-          La direction générale de l’énergie et du climat (DGEC), conjointement avec le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires,

-          La direction générale de la prévention des risques pour les compétences relatives à la sûreté nucléaire, conjointement avec le ministre de la santé et de la prévention,

-          Le secrétariat général du ministère conjointement avec le ministre de la transition écologique,

-          Le commissariat général au développement durable, conjointement avec le Premier ministre et le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.  

-                     

La ministre de la transition écologique peut également faire appel à plusieurs corps d’inspections ou directions centrales telles que l’inspection générale des finances, la direction générale des entreprises (lorsqu’elle exerce ses compétences en matière de développement industriel dans le domaine de la production et de la consommation d’énergie), le commissariat général à la stratégie et à la prospective, la direction générale de l’aménagement, du logement et de la nature. 

C’est Agnès Pannier-Runacher qui a été nommée ministre de la transition énergétique. Elle a annoncé dans le JDD qu’elle sera prochainement appuyée par un délégué interministériel chargé du nouveau nucléaire.  

 

III.               Le Ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires 

 

En vertu du décret n°2022-832 du 1er juin 2022, le ministre de la transition écologique hérite de compétences autrefois dévolues aux ministres du Logement, de la Cohésion des territoires ou de la Ville (cohésion des territoires, lutte contre les inégalités territoriales, politique de la ville, urbanisme, lutte contre l’étalement urbain, équipement, logement. etc.) ainsi qu’au ministre de la Transition écologique.  

En matière de transition écologique, il est chargé des politiques relatives à la protection de la biodiversité, de la nature et au développement durable. A ce titre, il exerce son autorité sur :

-          Le secrétariat général du ministère, conjointement avec la ministre chargée de la transition énergétique,

-          Le commissariat général au développement durable, conjointement avec la ministre chargée de la transition énergétique et la Première ministre,

-          La direction générale de l’énergie et du climat pour l’exercice des compétences relatives à l’adaptation au changement climatique, à la qualité de l’air et la réglementation technique des véhicules,

-          La direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature bien que le texte ne soit pas très clair sur ce point. 

 

C’est Christophe Bechu, ancien maire Horizons d’Angers, qui a été nommé ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Lorsqu’il était maire d’Angers, il a déclaré en 201 « Je ne suis pas un grand fan de l’éolien. Il y a le coût du démantèlement, l’impact visuel… ».

Il est épaulé par une secrétaire d’Etat, Bérangère Couillard, en charge de l’écologie qui est responsable  notamment de :

-          la préparation et la mise en œuvre de la politique du Gouvernement dans les domaines de la protection et de la valorisation de la nature et de la biodiversité et de la transition vers une économie circulaire.

-          La gestion de la faune sauvage, incluant les grands prédateurs, du bien-être de la faune sauvage, de la police de la chasse et de la pêche en eau douce, de la protection des paysages et des sites ainsi que du contrôle de l'utilisation et du commerce des espèces animales et végétales,

-          le pilotage et la coordination de la stratégie nationale pour la biodiversité.

-          la politique de protection, de gestion et de police de l'eau.