vendredi 8 juillet 2022

L’accélération du mix charbon-éoliennes de l’Allemagne ou l’incroyable échec de l’Energiewende

 

Une tribune signé par Fabien Bouglé, expert en politiques énergétique.

Robert Habeck, Ministre « vert » allemand de l’Economie vient d’annoncer publiquement, qu’à défaut du gaz d’origine russe, l’Allemagne allait être contrainte de relancer en urgence ses centrales au charbon. Cette annonce suivait celle qui excluait de reporter l’arrêt des 3 réacteurs nucléaires allemands encore en activité , qui, en principe, doivent s’arrêter fin 2022, malgré la demande du patronat d’en reporter la fermeture.

La relance du charbon par nos voisins n’est pas exclusivement dû à la limitation par la Russie de ses approvisionnements en gaz, qui, avant la guerre en Ukraine, représentaient plus de 50% des besoins en Allemagne. Non, la faible activité, en 2021, des éoliennes intermittentes allemandes, dont la production avait chuté de près de 14% par rapport à 2020, les avait contraints d’augmenter de 25% la production d’électricité au charbon et à la lignite, qui était ainsi redevenu leur première source d’électricité.

Le modèle éoliennes-énergie fossile de l’Allemagne

La guerre n’a fait qu’accélérer un phénomène de dépendance de l’Allemagne aux éoliennes ou aux panneaux solaires, qui nécessitent le complément des centrales fossiles, et ne sert qu’à camoufler l’échec retentissant de l’Energiewende, dénoncé depuis plusieurs années par la Cour fédérale des finances. En effet, à plusieurs reprises elle s’était alertée dans ses rapports sur ce modèle qui allait conduire à une explosion des factures d’électricité des Allemands, et à une multiplication des coupures d’électricité. Et nous y sommes !

Bien avant la guerre, le magazine Newsweek avait titré un article retentissant le 27 octobre 2021, « Les pannes d’éoliennes à l’origine de la crise énergétique en Europe sont un avertissement pour l’Amérique », soulignant que le choc gazier était dû à la multiplication en Europe des éoliennes couplées au gaz ou au charbon, dans un contexte de reprise économique post-covid. Les observateurs d’outre-Atlantique avaient parfaitement identifié que la multiplication des éoliennes créait une forte dépendance aux énergies fossiles, conduisant à une inflation énergétique.

La guerre n‘a fait qu’accélérer et augmenter le besoin en énergies fossiles de substitution au gaz russe, comme le charbon ou la lignite, conduisant à une explosion de la facture énergétique, déclenchant mécaniquement une terrible spirale inflationniste.

Le plus incroyable est que l’Allemagne continue de dénigrer le nucléaire français décarboné, allant jusqu’à militer dans les institutions européennes pour qu’il ne soit pas reconnu dans la taxonomie des activités vertueuses pour le climat, alors que son bilan carbone n’est que de 3,7 g de CO2 /kWh selon une récente études des experts d’EDF. Cela place le nucléaire comme la source d’électricité la plus vertueuse dans le monde pour le climat, alors que le charbon produit 1 000 g de Co2/kwh et des particules fines contenant mercure et uranium, polluant les autres pays européen par les fumées des hautes cheminées des centrales allemandes.

Nucléaire français vs Energiewende allemande

La France, qui émet environ 50 g de co2/ kwh d’électricité, est un des pays les plus vertueux en Europe pour les faibles émissions de son mix électrique : elle se trouve paradoxalement mise en accusation par l’Allemagne, qui avec 500 g de CO2/kwh, a un mix électrique 10 fois plus polluant. C’est donc le pays qui a le bonnet d’âne en Europe qui reproche au meilleur élève européen de ne pas suivre son modèle désastreux pour la planète et le climat.

Du reste la France, dont les dirigeants sont toujours sous contrôle de puissants réseaux d’influence allemands, vient malheureusement d’annoncer la relance d’une centrale au charbon sur son sol, et souhaite accélérer l’installation des éoliennes, s’inspirant sans discernement du modèle d’Energiewende de nos voisins.

Par une incroyable perte de lucidité ou par naïveté – sous prétexte de fédéralisme européen – les dirigeants français s’engouffrent dans une politique dictée par l’Allemagne. Dans son discours de Belfort, tout en annonçant à minima la relance salutaire du nucléaire, le Président Macron envisageait en même temps une incroyable multiplication des éoliennes maritimes ou terrestres et des panneaux solaires dont aucun ne sont fabriqués en France.

Notre pays continue d’acheter des éoliennes en Allemagne, qui n’hésite pas à commander des avions de chasse américains ou des vols de fusée SpaceX. Et lorsque les réseaux d’influence allemands font voter récemment deux commissions du Parlement européen contre l’intégration du nucléaire dans la taxonomie verte européenne, le Président Macron laisse passer cette agression, sans aucune réaction politique de fermeté.

Mais cette attitude climato-hypocrite de l’Allemagne n’est pas une découverte pour la France. Déjà en 2019 la sénatrice Anne-Catherine Loisier avait dévoilé un rapport de l’Agoraenergiewende intitulé « L’Energiewende et la transition énergétique à l’horizon 2030 », qui se réjouissait que « […] si des capacités nucléaires sont retirées du mix français, la compétitivité des centrales à charbon maintenues dans le système en Allemagne est améliorée. »

Depuis la fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim, la France, qui exportait 12 térawattheures d’électricité décarbonée par an à l’Allemagne, se trouve contrainte de devoir importer la même quantité de ce pays, alors qu’il s’agit d’une électricité sale et très polluante.

Un incroyable échec

Il est temps pour nos gouvernants de tirer un trait sur le modèle allemand de l’Energiewende, qui mène l’Europe dans une situation de chaos énergétique, par forte dépendance aux fossiles et une spirale inflationniste incontrôlée.

Il est temps de prendre acte que le modèle de nos voisins allemands est un incroyable échec.

Il est temps enfin de prendre conscience que nous avons un formidable atout avec notre patrimoine électrique nucléaire qui permet d’assurer notre souveraineté électrique en contrôlant la facture énergétique des ménages et des entreprises tout en ayant un impact particulièrement faible sur nos émissions de gaz à effet de serre.

Nos centrales nucléaires – si on veut bien se donner la peine de les entretenir correctement – ont cette capacité de produire une électricité stable et puissante assurant à nos concitoyens la fiabilité de nos fournitures d’électricité.

A l’heure où les principaux patrons des entreprises énergétique appellent les français à la baisse de leur consommation en raison des risques de pénuries électriques, que la politique d’apprenti-sorcier inspirée de l’Energiewende allemand a contribué, à organiser, il est vraiment temps d’envisager une disruption énergétique basée sur un nouveau plan massif du nucléaire français, suite naturelle du plan Messmer de 1974.


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