samedi 20 février 2021

Les parlementaires questionnent l'impact des ondes sur les animaux d'élevage

Suite à une saisine de la Commission du développement durable de l'assemblée nationale, l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et techniques a organisé plusieurs tables-rondes, le 18 février, sur le sujet délicat de l'impact des ondes électromagnétiques sur les animaux d'élevage.

 

Comportements anormaux, perte de productivité et de qualité, décès inexpliqués… Ces constatations, des éleveurs installés à proximité d’installations électriques, d’éoliennes, d’antennes relais, sont des centaines à les faire. Néanmoins, le lien direct entre les ondes électromagnétiques et les problèmes rencontrés dans l'élevage reste difficile à établir, et les pistes d’amélioration et de recours, pour les producteurs concernés, s’avèrent quasi-inexistantes. Saisi par la Commission du développement durable de l’Assemblée nationale, l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et techniques (OPECST) a organisé le 18 février près de quatre heures d’audition et de témoignages d’experts, d’éleveurs, de vétérinaires, de scientifiques.

Et cet échange de vues était plus que nécessaire tant la problématique est complexe, que ce soit « au niveau des phénomènes physiques en jeu, de la différence de nature des installations, de la méconnaissance de la réaction des animaux, et des méthodes et outils qui examinent mais laissent sans réponse de nombreuses questions », souligne le député du Maine-et-Loire Philippe Bolo (Modem), en charge d’un rapport sur cette question de l’impact des ondes électromagnétiques sur les animaux d’élevage. La difficulté est d’autant plus manifeste que, parfois, des exploitations se trouvent à proximité d’installations électriques sans que l’on constate de problème particulier.

 

Une vulnérabilité particulière des élevages

Les différentes études montrent, en tout cas, une vulnérabilité particulière des élevages vis-à-vis des ondes électromagnétiques : beaucoup d’éléments métalliques sont présents dans les bâtiments, le matériel utilisé peut aussi renforcer les phénomènes (robots, racleurs,…). Et il existe aussi des vulnérabilités plus fortes en fonction des saisons : en hiver, quand les animaux sont davantage en bâtiment et que l’électricité est davantage utilisée, ou en période de sécheresse, quand la prise de terre est enfoncée dans un sol trop sec, explique ainsi Laurent Delobel, docteur vétérinaire.

À partir de l’expérience d’Henri Laborit, il explique également comment se comportent les animaux en cas d’inconfort chronique générant du stress. La première option est la fuite, une situation constatée par des éleveurs à proximité d’installations électriques : par exemple, certaines aires paillées sont délaissées, les animaux se regroupent à un seul endroit. Quand la fuite n’est pas possible, on observe une baisse des comportements grégaires, puis une prostration. Certains signes comportementaux sont caractéristiques, comme une vache qui lape l’eau au lieu de boire normalement, explique le vétérinaire.

Des éleveurs souvent livrés à eux-mêmes

Pour Alain Crouillebois, éleveur laitier dans l’Orne, les ondes électromagnétiques, sont ainsi « huit années de galère ». Installé en 1996, son exploitation alimentée par un ouvrage électrique aérien ne connait aucun problème particulier. En 2011, Enedis remplace l’installation par une ligne moyenne tension en sous-terrain. « À partir de là, j’ai constaté une baisse de production, une dégradation de la qualité du lait, des mouvements anormaux des vaches. J’ai été obligé de faire des aménagements pour forcer les animaux à aller au robot de traite, ce qui n’est pas normal », explique-t-il. L’éleveur connait également des problèmes de croissance et de santé sur les veaux, et perd beaucoup d’animaux. En 2017, l’analyse du GPSE (Groupe permanent pour la sécurité électrique en milieu agricole) préconise des aménagements mais « rien sur les ouvrages d’Enedis à proximité de mon bâtiment », témoigne-t-il. Ce n’est qu’après avoir pris en charge le déplacement des ouvrages sous-terrain 150 mètres plus loin, en 2019, que tout redevient comme avant : « le comportement des animaux est redevenu normal, les vaches ont réaccédé d’elles-mêmes au robot, je n’ai plus eu de souci de croissance. J’ai retrouvé une vie sereine après huit années de galère », commente l’éleveur.

 

S’il n’est pas le seul éleveur à rapporter une dégradation avérée de la situation de son élevage suite à la mise en place d’installations électriques, le lien de cause à effet reste difficile à prouver, et obtenir des aménagements sur ces installations s’avère complexe. L’Anast (Association des éleveurs sous tension) rassemble les témoignages d’éleveurs dans cette situation pour assurer une défense collective.

Du côté de l’OPECST, des propositions doivent être faites suite à ces auditions pour assurer notamment une plus grande transparence. « On a besoin de creuser encore, du point de vue scientifique, sachant que ces problématiques relèvent aussi de la géologie, et qu’il n’y a rien de plus compliqué que la géologie », conclut le député de l’Essonne Cédric Villani (EDS), président de l’office. « Les cas rapportés sont de vrais cas de souffrance, nous allons apporter du suivi », ajoute-t-il.


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